Mardi dernier, CA, Mot’, plus de 20 personnes. Côté méthode, c’est l’animation de discussion tournante. Il me semble qu’il y a eu au moins trois personnes qui successivement ont attribué les tours de paroles, et de façon totalement spontané.

Important débat sur la relation avec le collectif unitaire antifasciste qui s’active pour la venue de Le Pen le 28. Ce sont à chaque fois des moments où le groupe carbure intelligemment, sans dogmatisme, mais avec des convictions profondes.

Le groupe cherche des alternatives en essayant de préserver les futures relations avec les membres du collectif unitaire. Comment lutter autrement contre l’extrême droite, chacun a des idées plein son sac, là où ça coince, c’est comment ne pas passer pour des « lâches » et compromettre les chances de retrouvailles au troisième tour.

Un autre sujet, les finances, qui semblent aller plutôt bien, se pose la question du prix du futur journal qui exploserait le budget tout en ne dépassant pas le limites remboursables. Là aussi ça discute bien, c’est sur le côté moral, autant de fric pour ça. M. répliquant que la démocratie a un prix.

Sont abordés aussi les noms sur la liste, il faut prévoir une quinzaine de nom de gens qui seraient disponibles pour entrer au conseil municipal pour de vrai… Personne ne croit au dernier sondage qui met Mot’ à 17%, toutefois il faut être prêt à toutes éventualité.

J’ai du mal à filmer ceux qui ne sont pas « bon ». C’est une chose terrible, il y a ceux qui « ne passent pas bien » à la caméra.  Ce putain d’outil vidéo privilégie ceux qui parlent bien, de façon concise, la voix assurée, un peu forte, si en plus ils ont un physique, alors ça se fait tout seul.

Ch. parle dans sa barbe, bégaye, mets trois heures à exposer une idée, parfois assez complexe, voir carrément tordue, mais parfois tout à fait pertinente. J’ai un mal fou à le filmer, je ne sais pas que faire de ces images là, j’ai aussi ce problème avec A. qui dit les choses à sa façon, en butant sur les mots. C’est un outil excluant, et j’ai bien du mal à en faire autre chose. C’est un axe que je cherche toujours à traiter,  dire aux spectateurs attention, la caméra ne vous fait voir que ce qu’elle veut bien vous montrer, si vous voulez voir le reste alors, vivez-le! Pas facile à faire passer comme idée.

PS m’écrit…

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Les tenants de l’avant garde du prolétariat ne peuvent pas avoir d’autre discours que celui qu’ils t’ont assené. La technique de t’envoyer quelqu’un d’autre que celui prévu au rendez vous est d’un classicisme à toute épreuve. C’est la tactique de base du militantisme professionnel, et toi tu n’est qu’un amateur, qui quand il refuse d’être compagnon de route devient traître. En plus de voir leur score/sondage diminuer alors que celui de Mot’ augmente ne peut être qu’amer pour eux, non pas du fait de leur score mais parce qu’ils on fait une mauvaise évaluation de la situation, et qu’ils ne peuvent pas faire machine arrière, c’est a dire faire de l’entrisme dans Mot’, ce qu’ils auraient du faire s’ils avaient été plus à l’écoute du mouvement social.

Mot’  l’a échappé belle.

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C’est très bizarre, tout ce qu’on me dit sur la LCR, ses pratiques, etc., ça ne me va pas complètement. Je trouve toujours ça réducteur, trop facile.

Reste que c’est cette lettre qui m’a redonné la pêche pour y remettre mon nez à la suite de la réunion de Mot’. C’est donc l’avant dernière AG avant les élections.

J’arrive à la bourre, les intros sont passées, c’est « le débat ».

J’ai l’impression d’avoir déjà assisté à la réunion, c’est bizarre, on est dans le rituel  à fond. La tribune avec les « chefs » dont  Aline Pailler assise juste en dessous de deux affiches de campagne où il y a sa photo, où elle  fait dix ans de moins. Je peux me gourer, mais je n’arrive pas à croire que c’est une photo récente d’elle. Cette image là c’est déjà tout un programme (la caméra ne peut pas montrer de tels détails).   Dans la salle une cinquantaine de personnes, un quart de femmes. Hormis Aline Pailler, aucune  ne prendra réellement la parole. Une dizaine de mecs, donc, vont se livrer chacun à une analyse de la situation, toutes plus subtiles voir acrobatiques, les unes que les autres. Chacun semblant dire, « elle est pas belle, la mienne?». Dans des moments comme ça je pense à la dévirilisation de la politique. Il y a du boulot.

Ce qui me trouble le plus c’est que certains thèmes abordés chez Mot’ trouvent leur continuité ici. Notamment la participation de Mot’ au collectif unitaire antifasciste.

Je vis Mot’ plus comme une nébuleuse, eux les voient comme une entité, en fait ils voient Mot’ à leur image (celles de la LCR).

Encore un peu (bon, je pousse) Mot’ deviendra l’ennemi prioritaire.

A travers ce que j’ai entendu là, le troisième tour où tout le monde se retrouvera est sacrément compromis.

Le débat des idées devient un combat viril entre  ceux qui en ont, et ceux qui n’en ont pas!

Comme Mot’ est un mouvement tout jeune et qu’il n’est pas à même de brandir un programme, il devient coupable d’opportunisme, de démagogie, etc. On ne tient compte que des communiqués de presse. Le fait que des centaines de personnes discutent ensemble, réfléchissent, travaillent, ça n’existe pas. Pourtant c’est ça la politique, par contre qu’un journaliste du Figaro attribue à Salah un propos qu’il n’a jamais tenu tel quel, alors Aline Pailler, s’en saisit comme d’un trophée et déverse sa haine de Mot’.

Quant 100% obtient les médias, c’est une juste victoire, quand c’est Mot’, c’est une usurpation, etc.

Putain, il y a du mal.

Il est tard, je file avant la fin; E. B. me rejoint dehors pour discuter. Je lui avais reproché de figurer sur la liste 100%, et d’être intervenu en pleine AG de Mot’, quand ce n’était pas le moment, ni le lieu. On discute, et la fatigue aidant, je me lâche, je lui parle de l’idéologie en tant que masque autobiographique (j’ai dû piquer ça à Daniel Weber), lui me dit qu’il sépare totalement sa vie privée, et sa vie militante. Je lui dis qu’il n’y a pas de frontière, et que souvent dans sa vie militante on parle à son insu, de sa vie privée. Bref je lui fait une psychanalyse de bazar, qui pourtant semble le déstabiliser. Il répond à tout ça, que lui, son seul but, c’est la lutte contre le PS et sur ce parking d’immeuble éclairé par un réverbère jaune, je le vois non plus comme un tribun qu’il sait être, mais comme un enfant, seul, souriant quand même.

J’ai été trop loin.

Dimanche AG Mot’.

15/02/01